Louis Gallois, le PDG d'EADS était à Toulouse vendredi pour fêter les 30 ans du site d'Astrium. /Photos DDM, David Bécus
Louis Gallois, le PDG d'EADS était à Toulouse vendredi pour fêter les 30 ans du site d'Astrium, la division spatiale du groupe aéronautique. Il a accordé à La Dépêche du Midi un entretien exclusif.
Si la grève ne l'avait pas empêché de rejoindre Toulouse jeudi, Louis Gallois aurait passé deux jours dans la région. Il devait recevoir le prix du Cercle d'Oc 2010, un club économique toulousain, pour sa contribution au rayonnement de Toulouse et de Midi-Pyrénées. Le PDG d'EADS a toutefois maintenu sa présence vendredi sur le site d'Astrium Toulouse (3 500 salariés avec Spot Image et Info Terra), la division spatiale du groupe, pour fêter les 30 ans du satellitier. L'occasion aussi pour lui d'inaugurer un nouveau bâtiment dédié aux satellites d'observation de la Terre sur le site toulousain d'Astrium.
L'investissement de 25 millions d'euros permet à Toulouse de maintenir son leadership dans l'industrie spatiale. L'autre grande division d'EADS à Toulouse, c'est Airbus. L'avionneur qui vient de fêter ses 40 ans au cours d'une journée portes ouvertes a attiré la bagatelle de 145 000 visiteurs en une seule journée. Signe que l'industrie du ciel fait toujours rêver les habitants de Midi-Pyrénées, d'autant que le carnet de commandes d'Airbus se remplit de nouveau comme si la crise n'était qu'un mauvais souvenir. Le PDG d'EADS, originaire de Montauban, revient sur tous ces sujets pour La Dépêche du Midi.
Votre engagement dans le pôle de compétitivité et votre présence vendredi chez Astrium Toulouse sont-ils des signes de votre implication pour Midi-Pyrénées ?
Midi-Pyrénées est la première région française pour l'aéronautique et l'espace. Que je sois présent ici n'est pas surprenant. Je suis souvent sous le ciel toulousain. Et vendredi encore, j'avais le plaisir d'inaugurer un nouveau site chez Astrium avec son patron, François Auque. Je suis toujours heureux quand on investit car je suis assez préoccupé par l'avenir de l'industrie française. Quand on construit des usines, de la haute technologie en France et en Europe, on prépare l'avenir de nos enfants.
Y a-t-il un avenir pour l'industrie aéronautique en France et en Midi-Pyrénées ?
Bien sûr ! Nos industries ont des atouts forts en Europe : les capacités techniques, l'expérience, le savoir-faire accumulé au cours de décennies. Ce qu'il faut préserver en priorité, c'est notre capacité à créer de la technologie !
Le projet de Montaudran Aerospace, à Toulouse, de rassembler la recherche aéronautique près des pistes de l'Aéropostale va-t-il dans ce sens ?
J'ai rencontré le maire de Toulouse, Pierre Cohen, pour lui dire que c'était une très bonne idée et que nous serions en appui de ses initiatives pour rassembler la compétence technique autour de ce lieu historique.
La polémique sur la rivalité Toulouse-Bordeaux vous a-t-elle interpellé ?
EADS a des installations importantes en Aquitaine, une présence massive en Midi-Pyrénées, et nous souhaitons faire vivre les deux.
Le Stade Toulousain a arboré le nouveau logo EADS sur son maillot. Que représente-t-il ?
Tous les logos des filiales et des divisions ont été « restylés » et sont désormais harmonisés avec le nouveau logo d'EADS. Cela concrétise la force du groupe EADS, désormais mature. L'harmonisation des logos montre aussi l'intégration au sein d'EADS qui ne remet en cause ni la puissance des marques ni l'autonomie opérationnelle naturelle de chacune des divisions comme Airbus ou Astrium.
Airbus a attiré 145 000 visiteurs lors de la journée Famille. Est-ce le signe d'une réconciliation des salariés avec leur entreprise ?
C'est un succès qui montre qu'Airbus a une capacité d'attraction à nulle autre pareille et des produits formidables. C'est la preuve de l'adhésion de la population toulousaine à la cause d'Airbus. J'ai demandé aux responsables des autres sites de faire pareil parce qu'il faut que l'opinion publique, les jeunes voient ce que nous faisons. À Toulouse, on montre l'A380, l'A400 M ou les satellites d'Astrium, aux Mureaux on peut montrer Ariane V, à Marignane les hélicoptères. Il est de notre devoir de faire en sorte que les jeunes soient attirés par la haute technologie. Y a-t-il plus beau métier que de dessiner et construire un A380 ?
Cette semaine EADS va interroger ses 118 000 salariés pour savoir s'ils se sentent bien dans leur entreprise. La première enquête en 2009 avait révélé un moral déprimé. Attendez-vous de meilleurs résultats ?
Je ne sais pas si les réponses seront meilleures. Nous menons des actions de long terme. Changer un climat humain demande beaucoup de persévérance et de dynamique. Toutes les divisions, et notamment Airbus et Astrium, ont pris cette affaire à bras-le-corps. Elles apportent des réponses aux salariés qui estimaient qu'ils n'étaient pas assez considérés ou que le management ne communiquait pas assez. Désormais on remet le personnel au cœur de l'entreprise.
La crise économique est-elle derrière EADS ?
Il y a une reprise sérieuse et progressive du marché des avions. Airbus a relevé son objectif de commandes sur l'année. Nous tablions sur 250 à 300, nous sommes désormais au-delà de 400. En revanche la restriction des budgets de défense et spatiaux dans les pays européens nous préoccupe.
La baisse du dollar vous inquiète-t-elle ?
Je crains que le président Obama qui n'a plus beaucoup d'instruments pour relancer son économie, ne soit tenté d'utiliser l'arme monétaire. J'espère que le prochain G20 de Séoul abordera ce sujet pour éviter une « bataille » des taux de change. Il est très difficile de gérer une entreprise comme la nôtre avec des monnaies qui font le yo-yo.
Allez-vous remotoriser l'A320 ?
La décision n'est pas encore prise. Airbus travaille dessus. Si une décision doit être prise, je la présenterai avec Tom Enders au conseil d'administration d'EADS, d'ici la fin de l'année.
Pourquoi avez-vous renoncé à votre part variable de rémunération ?
EADS n'a pas versé de dividendes cette année. Il me paraît assez normal que son patron ne se verse pas de part variable.
Pierre Gadonneix vient d'arriver à la tête du Toulousain Latécoère. Le connaissez-vous bien ?
Très bien ! Nous avons travaillé ensemble quatre ans au ministère de l'Industrie. Nous avons des relations d'amitié.
Allez-vous travailler ensemble pour l'avenir de la filière aérostructure en France ?
Nous travaillons déjà ensemble car Airbus est un sacré client pour Latécoère ! La consolidation du secteur a sa logique. Il faudra la mener un jour mais nous devons d'abord stabiliser Aerolia pour passer sereinement à la technologie composites. Airbus y veille. Notre priorité c'est Aerolia mais il est clair que Latécoère est un élément essentiel du dispositif en France et en Europe. On ne se désintéresse évidemment pas de son sort.
PUBLIÉ LE 27/09/2010 09:03 - MODIFIÉ LE 27/09/2010 À 11:27 | RECUEILLI PAR GIL BOUSQUET