Ce n'est pas si rare ni si miraculeux que ça.
- Turkish Airlines à Amsterdam Photo REUTERS
Le 16 août 2010, un Boeing 737-700 de la compagnie colombienne Aires, transportant 131 personnes, s'est écrasé à l'atterrissage en se brisant en trois. Seule une personne est morte dans ce crash, une femme de 73 ans, qui a succombé à une crise cardiaque après son évacuation. Un miracle, s'est exclamé la presse. Un miracle, vraiment? Nous republions un article paru en mars 2009 à l'occasion du crash du vol Turkish Airlines dans lequel 126 des 135 personnes à bord avaient survécu.
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L'amerrissage spectaculaire d'un vol US Airways le 15 janvier dans le fleuve Hudson à New York a sauvé la vie de ses 155 passagers et membres de l'équipage. Le 25 février, lors du violent crash du vol Turkish Airlines à côté de l'aéroport de Schiphol, 126 des 135 personnes à bord survivent. Des résultats impressionants, certes, mais plus courants qu'on ne le croit. D'après l'International Air Transport Association (IATA), si les accidents d'avion sont en hausse, le nombre de morts, lui, est en baisse. Il y a eu 502 décès suite à des accidents d'avion en 2008 contre 692 en 2008, soit 0,13 mort par million de passagers contre 0,23 en 2007.En août 2005, une invraisemblable série noire de crashs aériens avait entraîné à travers le monde des interrogations sur l'évolution de la sécurité aérienne. Depuis, les institutions de contrôle ont renforcé leurs mesures pour prévenir les risques. Mais que peut faire le simple voyageur pour mettre toutes les chances de son côté?
Eviter les compagnies latino-américaines et voler plutôt canadien
D'après le rapport sur la sécurité 2007 de l'aviation civile française, la région Amérique Latine / Caraïbes et la région Afrique représentaient chacune 18% des accidents mortels mondiaux pour respectivement 7% et 2% du trafic mondial en 2007. Les compagnies de la région Asie/pacifique représentaient 36% des accidents mortels pour 19% du trafic. Au contraire, la région Amérique du nord contribuait pour 42% à l'activité aérienne mondiale sans aucun accident mortel de passagers en 2007.
Vérifier la fiabilité de sa compagnie
Depuis 2006, l'Union Européenne actualise régulièrement une liste noire des «transporteurs aériens faisant l'objet d'une interdiction d'exploitation générale dans la communauté». La dernière mouturedate du 14 novembre 2008 et recense plus de 170 compagnies.
A l'inverse, l'International Air Transport Aviation (IATA) représente 230 compagnies aériennes et 93% du traffic aérien mondial. Depuis fin 2008, tous ses membres voient leur sécurité rigoureusement auditée.
Ecouter les consignes de sécurité
Après trois vols, vous avez peut-être l'impression de connaître toutes les consignes de sécurité par cœur. Sauf qu'en fait non, et que si un accident arrive vous serez sans doute dans un état de panique assez avancé pour vous faire oublier tout ce que vous avez cru savoir. Si vous n'avez pas le courage de lire la brochure, suivez au moins les démonstrations des hôtesses de l'air, et écoutez-les réellement! Par exemple, il ne suffit pas d'enfiler son gilet de sauvetage quand le commandant de bord l'ordonne, il faut surtout ne pas le gonfler avant d'être sorti de l'avion. Un détail? Lors du crash du vol Ethiopian Airlines 961 en 1996, de nombreux passagers sont restés bloqués dans l'avion à cause de leurs gilets de sauvetage gonflés, et ils sont morts noyés. Petit cours de rattrapage tout en dessin et en humour de la compagnie aérienne Virgin.
Se repérer dans la cabine
La grande majorité des accidents sont accompagnés d'incendies. Le danger ne provient alors pas des flammes mais bien de la toxicité de la fumée, d'où la nécessité d'évacuer au plus vite. Etant donné la visibilté très réduite que génère la fumée, savoir exactement où on se situe dans la cabine peut se révéler précieux. Pour cela, compter le nombre de siège entre sa position dans la cabine et les deux sorties de secours les plus proches en entrant dans l'avion. Pour les plus prévoyants, le repérage peut se faire avant même d'embarquer: certaines compagnies mettent à disposition sur Internet les plans de cabine des avions de leur flotte.
Se former à la sécurite aérienne
Les stages de gestion du stress d'Air France pour les personnes anxieuses en avion ont reçu beaucoup de publicité lors de leur lancement. Mais une autre sorte de formation, beaucoup plus pratique, existe pour mettre toutes les chances de son côté lors d'un accident ou d'un atterissage d'urgence. British Airways offre ainsi des «stages de sensibilisation à la sécurité aérienne» d'une demi-journée aux entreprises qui souhaitent former leurs employés voyageant fréquemment. La simulation comprend un atterrissage d'urgence dans un Boeing 737 reconstitué et l'évacuation de la cabine enfumée pour 130 livres par personne.
Dire oui à la position de sécurité
En cas d'accident, les hôtesses de l'air et stewards vous crieront sans doute «Brace position!» «Brace! Brace!» ou encore «Penchez-vous!». Il faut redresser son siège, se baisser le plus possible au point d'avoir sa tête entre ses jambes. Les mains vont soit tenir les genoux, soit se mettre derrière la tête, mais sans croiser les doigts. Certaines rumeurs disent que cette position est censée rendre la mort aussi rapide et peu douloureuse que possible, ou encore qu'elle est conseillée par les compagnies d'assurance qui ne veulent pas payer de frais médicaux, mais n'écoutez pas ces hoax. La «brace position» permet d'empêcher au maximum d'être projeté vers l'avant de l'avion et de s'écraser sur les sièges de devant.
Une question de pilotes
Un avion qui tombe en panne au milieu de l'océan Atlantique, un vol d'oiseau qui bloque les deux réacteurs quelques secondes après le décollage. Ces situation, à première vue vouées à un destin tragique, ont en commun d'avoir connu une issue heureuse grâce au sang-froid des pilotes. Dans le premier cas, le pilote Robert Piché a posé l'appareil aux Açores avec les deux moteurs arrêtés après un vol plané de plus de 21 minutes, «le plus long de l'histoire aéronautique». Aucun des 293 passagers et des 13 membres d'équipage n'a été sérieusement blessé. Dans le deuxième cas, le désormais célèbre Chesley B. Sullenberger a posé son avion sur le fleuve Hudson, sauvant la vie de tous les passagers.
Oublier la place miracle
«Quel siège est le plus sûr?», une question que tout le monde s'est déjà posé en entrant dans un avion, surtout s'il s'agit d'un vol low-cost où les places ne sont pas attribuées. Pour certains, les places du milieu présentent moins de risques, car le fuselage y est plus résistant. Mais c'est également là que se trouvent les réservoirs de carburant. Selon CNN, qui s'est penché sur la question, il est probable que la «place la plus sûre» n'existe pas. Même une place proche des sorties de secours ne garantit pas une évacuation rapide, les portes ne fonctionnant pas toujours après un accident. Quant aux places qui bordent les allées, elles permettent plus de mobilité mais sont sujettes à un autre type de risque, bien plus fréquent que le crash: les bagages qui tombent des compartiments sur la tête.
Enfin, toutes ces recommandations ne peuvent que ramener le risque à un niveau proche de zéro, pas l'éliminer. Le destin fait le reste du travail. Le businessman néerlandais Rob de Knecht vient de survivre à deux crashs d'avion en huit jours, dont celui du vol Turkish Airlines sur l'aéroport de Schiphol, avec seulement quatre côtes cassés. Le meilleur moyen de survivre à un crash serait-il de s'asseoir à côté de Rob?
Source : Cécile Dehesdin et Grégoire Fleurot
Photo: l'amerrissage du vol US Airways le 15 janvier sur le fleuve Hudson, pris par Janis Krums, via Twitpic