Depuis le début de l'année 2008, la Tunisie a connu un grand mouvement de délocalisation surtout en ce qui concerne l'industrie aéronautique et les services en relation avec ce secteur. Selon le Groupement des Industries Tunisiennes Aéronautiques et Spatiales (GITAS), qui réunit 17 sociétés, principalement d'origine française, la sous-traitance aéronautique tunisienne connaît un développement sans précédent. Elle emploie actuellement 2 000 salariés et ce chiffre pourrait doubler d'ici à deux ans.
Ce mouvement a commencé en janvier, avec l'ouverture d'un nouveau siège du groupe SITA en Tunisie. A travers cette implantation, le groupe, premier fournisseur mondial de services de communication destinés au secteur du transport aérien, a permis le renforcement du secteur en Tunisie.
Autres délocalisations, celle de Latécoère. Le groupe est présent en Tunisie depuis 1995 où il possède déjà deux unités de production : l'une à la Charguia, près de Tunis, l'autre, depuis 2006, à Zaghouan. Ces deux sites sont spécialisés dans le câblage.
L'expérience réussie de Latécoère a attiré l'attention du groupe Zodiac.
Ce groupe, qui a vu le jour en 1896, se développe sous 4 branches d'activité :
• Aerosafety Systems
• Aircraft Systems
• Airline Equipment
• Technology
Présent en Tunisie depuis l'an 2000, Zodiac soustraite une partie de sa production de la branche AeroSafety Systems, qui conçoit et fabrique principalement des équipements aéronautiques destinés aux constructeurs, qu'ils soient avionneurs, fabricants d'hélicoptères ou d'engins et de systèmes d'armes, ainsi qu'aux compagnies aériennes, aux armées et à la recherche spatiale.
Ce mouvement de déplacement, auquel on assiste depuis quelques années, est dû, en premier lieu, au faible coût de main d'œuvre de la Tunisie. C'est d'ailleurs dans ce contexte que Mr Philippe Cussonnet, président du Gitas a fait remarqué : « La main d'œuvre tunisienne coûte de quatre à six fois moins cher qu'en France ».
Mais ceci ne demeure pas le seul élément pour lequel ces groupes et sociétés ont choisis la délocalisation. La Tunisie dispose d'une main-d'œuvre qualifiée et qui parle bien le français.
Ces raisons n'ont pas laissé Airbus indifférent. Ce dernier a choisi, dans le cadre de son plan Power8+, d'installer une nouvelle usine en Tunisie.
Cet investissement, qui a été annoncé en septembre dernier, permettra la création de 2000 emplois, moyennant une enveloppe de 100 millions d'euros. Ce mégaprojet sera installé à la zone industrielle « Mghira 3 » prés de Tunis sur une surface de 20 hectares.
Un autre constructeur aéronautique, d'origine italienne, a récemment annoncé son implantation en Tunisie. Storm Aircraft, spécialisé dans les avions touristiques, est entrain de construire un site de production et d'assemblage, moyennant un investissement de 2 millions d'euros. Les activités de ce site, qui siègera à Mateur dans le Nord du pays, devraient démarrer en janvier 2009, créant ainsi une soixantaine d'emplois.
Tabarka accueillera à son tour un mégaprojet dans le même secteur. Selon Mr Abderrahim Zouari, ministre du transport, un groupe américano-koweïtien, spécialisé dans la maintenance aéronautique, à choisi cette ville touristique du Nord pour s'y installer contre un investissement de 1 Milliard de dinars.
La tendance d'implantation dans le Nord continue avec la société Mecahers qui a récemment choisi de créer un nouveau site de production dans le Sud de Tunis. Ce sous-traitant aéronautique, spécialisé dans la mécanique de précision implanté en Haute-Garonne française, démarrera ses activités dans un premier atelier de 1 600 mètres carrés, avec un effectif de 15 personnes.
D'autre part, et toujours dans le secteur aéronautique, la Tunisie se prépare à se doter d'un nouvel aéroport. Se situant à Enfidha, ce futur aéroport tunisien desservira plus généralement le nord du Sahel tunisien (dont Kairouan et Sousse) et le sud du cap Bon. Moyennant un investissement de 392,5 millions d'euros, ce mégaprojet devrait être mis en exploitation au plus tard le 1 er octobre 2009.
Réalisé par TAV Tunisie, filiale de l'opérateur turc TAV Aeroport Holding, l'aéroport international d'Enfidha aura une capacité initiale de 7 000 000 passagers par an et s'étendra sur 90 000 m 2 . Ce projet peut contenir un projet de maintenance aéronautique.
Comment pourrait-on expliquer une telle « migration » des sociétés du secteur aéronautique ?
Ce n'est pas mine de rien que ces constructeurs et sous-traitants ont choisis de délocaliser une partie de leur production en Tunisie.
Bien évidemment, une grande entreprise ne peut pas se contenter d'un Chiffre d'affaire en croissance. Surtout avec les nouvelles donnes imposées par la mondialisation, de la concurrence féroce, de la fluctuation hystérique des prix des combustibles, des coûts de plus en plus élevés de la main d'œuvre.
L'élément le plus important demeure la crise financière internationale, qui a causé une énorme inflation pour les USA et l'Europe, et qui s'est rapidement transformée en déflation avec la faillite de plusieurs banques et la chute des prix des hydrocarbures.
Face à cette situation, les pays européens ont compris que pour y faire face, la solution est dans la délocalisation, surtout face à une Asie imbattable au niveau des coûts et de la main d'œuvre.
Pour la Tunisie, la situation a été différente. Notre pays a adopté une démarche saine qui l'a conduit à atteindre des chiffres rassurant en ce qui concerne la croissance économique et l'attractivité des IDE.
Afin de poursuivre cette démarche et d'améliorer ces indicateurs et en vue de catalyser davantage les IDE, le gouvernement tunisien, à l'ère du Changement, a fait plusieurs initiatives.
On peut citer comme exemple la signature de l'accord relatif au démantèlement complet des barrières avec l'union européenne constituant ainsi une zone de libre échange, les incitations accordées aux entreprises exportatrices, la loi de finances 2008 adaptée aux objectifs tracés par l'Etat, les mesures d'allégement des impôts…
Toutes ces majestueuses réalisations, qui contribuent au renforcement du statut économique tunisien, demeurent insuffisantes à la lumière de la situation financière internationale actuelle.
Il est vrai que sur le plan national, comme l'a déclaré le conseil de la BCT dans son dernier rapport, le secteur financier n'a pas été directement affecté par les retombées de la crise financière mondiale. Cependant, d'autres secteurs comme le textile les industries électromécaniques et le tourisme, nécessitent plus de suivi et d'encadrement pour éviter les dégâts de la crise.
Dans ce sens, la Tunisie doit aller de l'avant en poursuivant sa démarche initiale et en attirant plus d'IDE, qui sont susceptibles de construire une carcasse protectrice pour notre pays.